Sur une photographie en noir et blanc légèrement teintée de sépia, datée des années 1950-1960, on aperçoit Agostino Stoppele, élégamment vêtu, posant sur la célèbre Piazza San Marco à Venise. Chapeau fedora incliné, canne à la main, son allure reflète le raffinement d’une époque révolue. À ses côtés, une silhouette féminine : sa fille Nella, vêtue d’une robe légère et de gants, dont la grâce ajoute à la scène un parfum intemporel.
Cette image, au-delà de son esthétisme, raconte une histoire de vie. Après le décès de son épouse Angelina, Agostino était retourné s’installer à Vérone, non loin de Sant’Andrea di Badia Calavena. Parmi ses enfants, seule Ermelinda avait choisi de revenir vivre en Italie : elle y ouvrit une boucherie, devenant une figure commerçante dans son quartier. Nella, quant à elle, resta en France après l’exode de la famille durant la guerre. Elle vivait à Eauze, dans le Gers, et rendait visite de temps à autre à son père en Italie. Longtemps témoin de ce pan d’histoire familiale, elle s’est éteinte à l’âge remarquable de 99 ans.

La photographie fige aussi une atmosphère particulière : celle d’une Venise qui, déjà dans ces années-là, attirait voyageurs et touristes du monde entier. Sur la Piazza San Marco, les pigeons animent la scène tandis que l’architecture environnante – arches byzantines, colonnes sculptées, volets verts typiquement vénitiens – témoigne de l’éclat du lieu. Un détail se distingue nettement : la statue des Tétrarques, ces quatre empereurs romains figés dans la pierre, accolée à la Basilique Saint-Marc près de la porte nord. Leur présence, mystérieuse et imposante, ajoute une profondeur historique à cette photo de famille.
Mais derrière la beauté de ce cliché se dessine aussi l’écho d’un destin collectif. Agostino était le frère de Palmino Stoppele, partisan engagé, et donc l’oncle de Silvino et Maria Stoppele. Ainsi, au croisement de l’intime et de l’Histoire, cette photographie nous offre bien plus qu’une scène de voyage : elle transmet la mémoire d’une famille, ses allers-retours entre Italie et France, ses racines et ses héritages.
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.